SANTÉ MENTALE ET RISQUES PSYCHOSOCIAUX
Selon un rapport publié par l’Institut du Québec en février 2023[1] faisant le bilan de l’année 2022 sur la situation d’emploi au Québec, et ce, particulièrement quant à la pénurie de main-d’œuvre, le nombre d’heures perdues pour des raisons de maladie ou familiales demeure 19 % plus élevé qu’avant la crise sanitaire. « Autrement dit, les employeurs ont obtenu moins de travail par employé, ce qui a réduit l’offre de travail et fait s’accroître la demande de travail non comblée. »
Or, les absences recensées par les auteurs du rapport ne sont peut-être pas toutes liées à des problématiques de santé mentale, mais un travailleur qui s’absente du travail pour des problèmes psychologiques est souvent à l’écart pour une longue période, ce qui, selon les circonstances, peut mettre davantage de pression sur ceux qui restent.
La jurisprudence du Tribunal administratif du travail nous donne quelques exemples de circonstances problématiques entourant la gestion d’une surcharge de travail, lesquelles pourraient favoriser la reconnaissance d’une lésion professionnelle psychologique et l’indemnisation par la CNESST :
- Une absence d’aide ou de support, conjuguée à des conditions de travail particulièrement stressantes;
- Une formation insuffisante pour exécuter de nouvelles tâches;
- Un manque de ressources ou des changements des conditions de travail avec une augmentation des responsabilités, un cumul de tâches, associés à d’autres stresseurs qui entretiennent une tension accrue;
- Pallier à une absence de personnel tout en n’ayant pas pu bénéficier d’une formation appropriée;
- Une surcharge attribuable à la modification des conditions de travail ou à une modification importante des tâches.
Une simple perception de surcharge ne serait généralement pas suffisante pour permettre la reconnaissance d’une lésion professionnelle. Chaque cas est un cas d’espèce, mais ces exemples nous offrent certes quelques pistes de réflexions afin de minimiser les risques.
Aussi, la jurisprudence a déjà reconnu l’obligation de prévention de l’employeur face aux risques psychiques que pourraient comporter l’exécution du travail. Or, la prévention peut passer notamment par l’analyse de l’organisation du travail et par la mise en place de solutions concrètes et d’un plan d’action adapté. D’ailleurs, la protection de l’intégrité psychique des travailleurs est au cœur de la réforme visant la modernisation du régime de santé et sécurité du travail. Depuis le 6 octobre 2021, la Loi sur la santé et la sécurité du travail impose explicitement à l’employeur l’obligation de protéger la santé, la sécurité et l’intégrité psychique du travailleur. Des mesures de prévention accrues des risques psychosociaux du travail pourraient probablement contribuer à diminuer les heures de travail perdues et accroître ainsi la productivité des entreprises. Une chose est sûre, depuis la récente réforme législative, protéger l’intégrité psychique au travail est désormais une obligation claire que partagent les employeurs et leurs travailleurs.
Les avocats Le Corre & Associés, s.e.n.c.r.l
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Bilan 2022 de l’emploi au Québec, Pénuries de main-d’œuvre, où en sommes-nous ? https://institutduquebec.ca/bilan-2022-de-lemploi-au-quebec/
Zaldivar Valladares et CHSLD Vigi Mont-Royal, 2023 QCTAT 387
Association accréditée SPGQ, 2018 QCTAT 3963
RLRQ c. S-2.1., article 51