RETOUR AU BERCAIL
Septembre annonce le retour à une certaine normalité post pandémique pour plusieurs entreprises. Si le focus en SST a été mis sur le respect des règles sanitaires, il ne faut pas oublier une obligation qui incombe en tout temps à l’employeur, soit celle d’informer adéquatement le travailleur sur les risques liés à son travail et lui assurer la formation, l’entraînement et la supervision appropriés afin de faire en sorte qu’il ait l’habileté et les connaissances requises pour accomplir son travail de façon sécuritaire1. La jurisprudence récente du Tribunal administratif du travail (ci-après « TAT-SST ») lance un message important : la formation doit être sérieuse, continue et régulière, en plus d’être adaptée au contexte. Ainsi, des pratiques courantes telles qu’offrir une formation unique à l’embauche, se fier à l’expérience du travailleur ou confier un nouveau travailleur aux consignes rapides d’un collègue peuvent être jugées insuffisantes selon les circonstances.
Dans certains cas, l’intensité de l’obligation de l’employeur en matière de formation pourrait être plus importante lors du retour au travail à la suite d’une période de confinement. Dans une décision rendue en mai 2021, le TAT-SST a confirmé l’avis de correction émis par un inspecteur de la CNESST2. Dans cette affaire, un travailleur d’expérience s’était blessé en utilisant une scie circulaire. L’inspecteur a jugé que la formation était inadéquate. Le TAT-SST a confirmé l’avis de l’inspecteur parce que la formation était trop ancienne, malgré un rappel qui avait eu lieu un an avant l’accident, et que l’expérience du travailleur ne remplaçait pas une formation continue. Le travailleur a attribué son accident à un « brusque retour au travail » à la suite d’un confinement et à une inattention de sa part. Pour le TAT-SST, cette situation particulière, alors que les travailleurs peuvent être distraits et préoccupés lors du retour dans l’établissement, amène une plus grande obligation de formation.
Par ailleurs, la formation de nouveaux travailleurs est primordiale. Une autre décision récente implique une journalière qui s’est blessée avec une scie à onglets3. L’employeur alléguait que l’accident était uniquement attribuable à la négligence grossière et volontaire de la travailleuse4 qui n’avait pas retiré le gabarit, contrairement à la directive de sécurité en vigueur. Or, en guise de formation, une collègue avait simplement décrit brièvement à la travailleuse comment utiliser la scie. Le tribunal a conclu que la travailleuse avait été victime d’une lésion professionnelle. Bien que la pandémie ne soit pas en cause, cette décision demeure pertinente dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre.
Bref, n’oublions pas que le retour dans l’établissement de travailleurs même expérimentés, et l’accueil de nouveaux travailleurs doivent être adéquatement préparés !
1. Article 51(9) de la Loi sur la santé et la sécurité du travail
2. Coffrage Santco et C.S.N. - Construction, 2021 QCTAT 2292, Philippe Bouvier
3. Coffrages Synergy et Lafontaine, 2021 QCTAT 614, Guillaume Saindon
4. Article 27 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles