La possession de cannabis au travail peut être sanctionnée
À la suite de la légalisation de la consommation récréative du cannabis, plusieurs employeurs ont adopté une politique interdisant notamment la possession, la consommation et le trafic de drogues sur les lieux du travail. Or, même en présence d’une politique de tolérance zéro, le congédiement n’est pas la mesure qui s’applique automatiquement en cas de non-respect, car l’employeur, lors du choix de la sanction disciplinaire, doit tenir compte de toutes les circonstances de l’affaire.
Dans ce contexte, nous désirons attirer votre attention sur une décision rendue récemment, puisque l’arbitre a conclu que la simple possession de cannabis sur les lieux du travail, à plus forte raison en petite quantité, ne constituait pas une faute suffisamment grave pour justifier un congédiement1.
Dans cette affaire, la salariée était barmaid dans un hôtel coté cinq étoiles. L’employeur l’avait surprise en train de procéder à un échange de matériel suspect avec un de ses collègues. Dans ce contexte, et fort du doute qu’il entretenait concernant la présence de drogues sur les lieux du travail, il a ouvert le casier de la salariée à son insu et y a découvert un petit sachet de cannabis. Ces faits ont entraîné le congédiement de la salariée. Précisons que cette dernière connaissait la politique de l’employeur interdisant notamment la possession de drogues sur les lieux du travail.
L’arbitre a tout d’abord conclu que l’employeur avait un motif raisonnable de procéder à une fouille. Par la suite, il est arrivé à la conclusion que la transaction de drogues n’avait pas été prouvée de façon prépondérante. Enfin, en ce qui concerne la possession de drogues, l’arbitre a jugé que le congédiement était une mesure trop sévère. Il écrivait notamment ce qui suit :
« [71] Même si le cannabis est légalisé depuis le 17 octobre, il demeure que l’employeur était justifié, au moment pertinent, de ne pas tolérer que ses employés en apportent au travail.
[…]
[73] Il faut voir cependant que la quantité contenue dans le sachet était somme toute minime et que la simple possession de cannabis ne constitue pas un acte aussi grave et fatal que celui consistant à vendre ou consommer de la drogue sur les lieux du travail voire à posséder de la cocaïne. Ainsi l’illustre la jurisprudence déposée… »
Compte tenu du dossier disciplinaire chargé de la salariée et de ses regrets tardifs, l’arbitre a substitué une suspension d’un mois au congédiement de la salariée.
On voit donc qu’il est important de tenir compte de toutes les circonstances avant d’imposer une mesure disciplinaire pour possession de cannabis, d’autant plus que cette substance est maintenant légale. La quantité de cannabis en possession d’un salarié peut permettre d’établir la distinction entre la possession pour consommation personnelle et la possession pour en faire le trafic, laquelle faute est jugée beaucoup plus sévèrement, compte tenu des conséquences qu’elle peut avoir sur le milieu de travail.
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1. Union des employé(e)s de la restauration, syndicat des métallos, section locale 9400 et Canfitel inc., 2018EXPT-2192, 2018 QCTA 610, Me Andrée St-Georges. Pourvoi en contrôle judiciaire. Demande pour suspendre l'exécution de la décision accueillie en partie, 2018 QCCS 5082.