À l'embauche: que pouvez-vous demander aux candidats?
Au Québec, les règles applicables en matière d’enquête préembauche sont encadrées par une législation restrictive, et ce, même si tout employeur a le droit d’obtenir les renseignements personnels pertinents afin d’évaluer la capacité d’un candidat à occuper un poste à combler. Le Code civil du Québec1 et la Charte des droits et libertés de la personne2 protègent le droit à la vie privée. De plus, les lois encadrant l’accès aux renseignements personnels3 limitent également le droit de l’employeur d’obtenir des renseignements personnels. La cueillette de renseignements personnels est justifiée uniquement lorsque les renseignements sont nécessaires à l’objet du dossier. Ainsi, les études, l’expérience de travail ou les qualifications professionnelles constituent des renseignements nécessaires, alors que le numéro d’assurance sociale, par exemple, deviendra nécessaire uniquement lors de l’embauche, et ce, à des fins fiscales. La Charte des droits et libertés de la personne restreint aussi le droit de l’employeur d’obtenir des renseignements, puisqu’elle prévoit que celui-ci ne peut demander à un candidat de lui fournir des renseignements relatifs aux différents motifs de discrimination protégés par la Charte québécoise, à moins qu’il ne s’agisse d’une exigence professionnelle justifiée4. Nous vous rappelons que les motifs protégés par la Charte sont la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap5. Les aptitudes ou qualités requises par un emploi et nécessaires pour assurer l’exécution efficace et économique sont considérées comme une exigence professionnelle justifiée. L’exigence doit être raisonnable et fixée de façon préalable. De plus, la capacité des candidats doit être évaluée objectivement. Un employeur ne peut donc poser des questions à un candidat sur sa religion, par exemple, à moins qu’il ne s’agisse d’une exigence professionnelle justifiée. Avoir une exigence discriminatoire qui n’est pas justifiée par l’emploi ou poser une question illicite dans un formulaire de demande d'emploi ou lors d'une entrevue de sélection sont des motifs suffisants pour qu’un employeur soit condamné à verser des dommages. Par exemple, un employeur a été condamné à verser 10 000 $ à une chauffeuse de camion lourd, car il avait refusé de considérer sa candidature au motif qu’il n’embauchait pas de femmes6. Dans une autre affaire, un employeur a été condamné à verser 7 500 $ à un candidat à qui il avait demandé, lors d’une entrevue d’embauche, s’il était de religion islamique7. Enfin, dans l’objectif de s’assurer qu’un candidat possède toutes les qualités requises pour combler un poste, la vérification des antécédents judiciaires peut être une démarche retenue. Ce motif de discrimination ne fait pas partie des motifs protégés par l’article 10 de la Charte québécoise. Cependant, même si un employeur ne peut refuser d’embaucher un candidat uniquement parce qu’il a été déclaré coupable d’une infraction criminelle n’ayant aucun lien avec l’emploi, cela ne l’empêche pas de poser des questions sur les antécédents d’un candidat, la Charte n’interdisant pas explicitement les questions relatives aux antécédents judiciaires dans les formulaires d’emploi ou les entrevues de sélection, comme cela est spécifiquement prévu pour les autres motifs de discrimination. Cependant, l’obligation de démontrer que la cueillette est nécessaire s’applique comme pour toute autre cueillette de renseignements personnels. Bref, lors du processus préembauche, tout employeur a intérêt à préparer adéquatement sa cueillette de renseignements, en déterminant à l’avance les renseignements qui lui sont raisonnablement nécessaires, tout en prenant soin de restreindre ses questions aux seuls éléments nécessaires afin de déterminer si un candidat est apte à exercer les fonctions. Si vous désirez obtenir plus d'information à ce sujet, nous vous invitons à participer à l'atelier "De l'embauche à la fin d'emploi" ou à communiquer avec l'un ou l'autre des avocats de notre cabinet. ________________________________________ 1. L.Q., 1991, c. 65, article 35 2. L.R.Q., c. C-12, article 5 3. Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, L.R.Q., c. P-39.1 et Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, L.R.Q. c. A-2.1 4. Article 18.1 de la Charte québécoise 5. Article 10 de la Charte québécoise 6. C.D.P.Q. et Laurentian Shavings Products (1986) inc., 2011 QCTDP 2 7. C.D.P.Q. et Systématix Technologies de l’information inc., 2010 QCTDP 18 L’équipe Le Corre & Associés, s.e.n.c.r.l.
> Pour vous abonner à Gestion Plus, cliquez ici!
|