LE CONTENU D'UN QUESTIONNAIRE MÉDICAL PRÉEMBAUCHE
L’employeur qui décide d’embaucher un nouvel employé a le droit d’obtenir certains renseignements personnels afin de déterminer s’il a la capacité d’occuper le poste à combler. La Charte des droits et libertés de la personne contient des dispositions concernant spécifiquement l’embauche1. Ainsi, un employeur ne peut demander à un candidat de lui fournir des renseignements sur un des motifs de discrimination protégés par la Charte, à moins qu’il ne s’agisse d’une exigence professionnelle justifiée.
Un employeur peut donc obtenir des renseignements de nature médicale concernant la santé d’un candidat seulement lorsque de tels renseignements sont nécessaires pour déterminer s’il remplit les exigences normales du poste à combler. Les aptitudes ou qualités requises par un emploi et nécessaires pour assurer son exécution efficace et économique sont considérées comme une exigence professionnelle justifiée.
Différents outils peuvent être utilisés afin de recueillir de l’information de nature médicale lors de l’embauche, et le questionnaire médical est l’un de ses outils. Il doit toutefois demeurer le moins intrusif possible dans la vie privée du candidat. À cet égard, nous vous référons au jugement rendu par le Tribunal des droits de la personne dans Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre intégré de santé et de services sociaux des Laurentides2. Dans cette affaire, la salariée, qui avait postulé pour un emploi de psychologue, s’est vu accorder 4 000 $ à titre de dommages moraux, car le questionnaire médical préembauche contenait des questions discriminatoires, permettant de recueillir des informations sans relation avec les aptitudes ou les qualités requises par l’emploi de psychologue. À titre d’exemple, ce formulaire contenait des questions formulées de la façon suivante :
- Avez-vous déjà été absent de votre travail ou de l’école pour cause de maladie durant plus de 5 jours ? Si oui, précisez…
- À la section REVUE DES SYSTÈMES : Êtes-vous actuellement ou avez-vous déjà été traité, ou avez-vous déjà souffert de l’une ou l’autre des maladies suivantes ? Cochez la réponse et encerclez la maladie, la blessure ou le symptôme. Détaillez…
Le juge a conclu que plusieurs des questions n’étaient pas directement et rationnellement en lien avec les aptitudes ou qualités requises pour le poste convoité, notamment les « questions ouvertes sur les blessures, accidents, maladies, médicaments ainsi que concernant la revue systématique de l’entièreté des systèmes du corps humain… » (par. 137). Le juge a défini la notion de « question ouverte », en précisant qu’il s’agissait des « questions à formulation très large qui requièrent des informations qui ne sont pas ciblées dans le temps » (par. 138).
À la lumière de ce jugement récent, nous vous recommandons d’analyser votre questionnaire médical préembauche. Pour chaque question posée, vous devriez être en mesure de démontrer que le renseignement demandé est fondé sur les aptitudes ou qualités requises par le poste. En conséquence, il serait préférable d’utiliser un questionnaire médical en lien direct avec les aptitudes ou qualités requises par un poste.
De plus, tel que le précisait le tribunal, évitez les questions ouvertes, sans limite de temps et sans lien avec le poste, comme « Avez-vous déjà été hospitalisé… ». Vous n’avez pas besoin de savoir qu’un candidat a été hospitalisé dans son enfance ou qu’il a subi une appendicectomie dans sa jeune vingtaine.
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1. Articles 16 et 18.1.
2. 2017EXPT-294, 2017 QCTDP 2.
3. C.D.P.D.J. c. Bathium Canada inc., 2015 QCTDP 15. L’éditorial du Gestion Plus d’octobre 2015 portait sur ce jugement.